samedi 30 janvier 2010

Modeste contribution d'Étourneau à la recherche nationale sur l'identité nationale (25)

"it's the university, stupid" (2)

Mesdames, Messieurs et chers collègues, Veuillez, je vous prie, trouver en pièce jointe une motion pour la défense du Capes de Lettres Classiques, qui a été approuvée par le jury (du capes de lettres classiques) à une large majorité :- Oui : 29- NPPV : 6- Abstention : 1 Je vous serais très reconnaissante de bien vouloir diffuser ce texte au sein de vos associations et universités respectives, voire plus largement si vous connaissez d’autre canaux. En vous remerciant par avance de votre aide et votre soutien, je vous prie de bien vouloir agréer, Mesdames, Messieurs et chers collègues, l’expression de mes cordiales salutations. Sabine LucianiProfesseur de Langue et Littérature LatinesUniversité Stendhal-Grenoble3Vice-présidente du jury du Capes de Lettres Classiques

Motion pour la défense du CAPES de Lettres Classiques

Le jury du Capes externe de Lettres Classiques a pris connaissance :
des propositions des 13 et 18 novembre 2009 des Ministères de l'Éducation Nationale et de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche sur la réforme des concours de recrutement des enseignants
du projet de circulaire ministérielle « pour la mise en place des diplômes nationaux de master ouverts aux étudiants se destinant aux métiers de l’enseignement », publié le 8 décembre 2009 et remis aux organisations syndicales.
de l’Arrêté du 28 décembre 2009 fixant les sections et les modalités d’organisation des concours du certificat d’aptitude au professorat du second degré, publié au Journal Officiel du 6 janvier 2010.

Fort de son expérience en matière de recrutement des Professeurs de Lycées et Collèges, il tient à exprimer ici son opposition ferme et motivée à cette réforme en insistant sur les aspects qui relèvent directement de sa compétence, à savoir :

1. Le passage de 3 à 2 épreuves d’admissibilité et d’admission signifie pour notre Capes pluridisciplinaire, qui associe langue et littérature françaises, langue et littérature latines ainsi que langue et littérature grecques, un préjudice considérable dans l’évaluation équitable de la triple compétence, en français et en langues anciennes, des futurs professeurs de collèges et lycées. Si la spécificité, la richesse et l’intérêt des études classiques résident précisément dans cette complémentarité historique entre le français, le latin et le grec, cette amputation du concours représente un appauvrissement culturel en opposition avec la volonté affichée « d’améliorer la qualification des personnels » éducatifs. C’est pourquoi le jury ne peut accepter de voir les deux épreuves actuelles de versions (latine et grecque) fondues en une seule épreuve « fourre-tout », dont personne ne peut raisonnablement prétendre qu’elle permettra de vérifier conjointement les aptitudes du candidat en version latine, en version grecque et en explication de texte latin ou grec. La solution adoptée pour maintenir le grec et le latin à l’écrit du concours étant à la fois peu sérieuse et d'une invraisemblable complication, le jury demande instamment, au nom de la sauvegarde des humanités, la restauration de trois épreuves écrites et de trois épreuves orales pour le Capes Externe de Lettres Classiques.

2. En ce qui concerne l’oral, la disparition de l'épreuve d'explication de texte latin ou grec, qui n’est nullement compensée par le commentaire, nécessairement réduit, intégré à l’une des épreuves écrites, est extrêmement dommageable à la formation des enseignants de lettres. Cet exercice, prioritairement oral, légué par la tradition humaniste remontant à l'Antiquité elle-même, reste pour un professeur le meilleur moyen d'éveiller l'intelligence et la sensibilité de ses élèves face aux textes. Il ne saurait y avoir d'enseignement littéraire digne de ce nom sans commentaire de texte. Dans la mesure où un concours de recrutement de professeurs ne peut se dispenser de vérifier leur aptitude scientifique dans toutes les matières qu’ils auront à enseigner, le jury demande la restauration de l’épreuve orale d'explication de texte en langue ancienne au Capes Externe de Lettres Classiques.

3. Le calendrier du concours annoncé le 13 novembre 2009 pose de multiples problèmes :
En fixant au 1er décembre de l’année de M2 les épreuves d’admissibilité, il ne laisse guère plus de deux mois pour la préparation des candidats au programme du Capes. De plus, il n’est guère raisonnable de croire qu’un tel calendrier permettra aux étudiants de tenter leur chance au CRPE en septembre, aux Capes, CAPLP et CRCPE en novembre-décembre et à l’agrégation en avril. Les programmes des concours du premier et du second degré étant totalement différents, ils ne concernent pas les mêmes étudiants et, lorsque les candidats choisissent de préparer deux concours à la fois, il s’agit très naturellement du Capes et de l’Agrégation.
Il est de plus impensable que les étudiants admissibles au Capes puissent, au cours du 2e semestre de M2, à la fois préparer des oraux, effectuer des stages et soutenir un véritable mémoire de recherche.
Le jury demande donc une révision du calendrier des épreuves qui permette de donner aux étudiants le temps nécessaire à la fois à une préparation sérieuse aux épreuves écrites et orales du Capes et à la rédaction d’un véritable mémoire de recherche.
4. De manière plus générale, le jury est frappé par le caractère démesuré des exigences auxquelles les nouveaux masters sont tenus de répondre, puisqu’ils doivent, conjointement préparer aux concours de recrutement (épreuves disciplinaires et nouvelles épreuves professionnelles), intégrer deux à trois stages d’enseignement, proposer une initiation à la recherche qui permette la poursuite d’études en doctorat, et enfin, préparer une réorientation professionnelle en cas d’échec au concours d’enseignement. En multipliant les objectifs de manière déraisonnable, un tel cahier des charges risque de porter atteinte non seulement aux compétences disciplinaires, mais à la professionnalisation des futurs enseignants.

Sans une évolution significative des quatre points évoqués, le concours deviendra incohérent et se trouvera en contradiction avec les objectifs qui lui ont été assignés. Il ne répondra plus aux exigences d’un concours d’État. Le jury du Capes externe de Lettres Classiques veut croire que ces préoccupations, qui rejoignent pleinement les objectifs d'amélioration de la formation fixés par les documents de cadrage, seront enfin prises en compte par les autorités compétentes. Les membres soussignés demandent avec insistance l’abrogation du décret qui définit les programmes du CAPES et l'ouverture d'une véritable discussion visant à permettre la tenue, dans les meilleures conditions possibles, de la session 2011.

vendredi 29 janvier 2010

"it's the university, stupid"

Critiquant sur son blog Mediapart la façon dont un journaliste, Philippe Jacqué, a rendu compte dans le Monde du 26 janvier du rapport récemment remis par Philippe Aghion, professeur d'économie à l'université de Harvard, à la ministre de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche, Christophe Pebarthe conclut, après avoir fait allusion à ces gens compétents qui, à l'époque du président William J. Clinton, répondaient doctement à tous ceux qui formulaient des objections à telle ou telle disposition politique : "It's the economy, stupid!" :

« Structurellement sous-financées par l'État, gangrenées par un sous-encadrement administratif et pédagogique, abruties par des réformes qui sapent de l'intérieur ses missions traditionnelles d'enseignement et de recherche, désorganisées par des présidents dont les pouvoirs peinent à trouver leurs limites, les universités françaises n'ont certainement pas à afficher comme ambition première de participer à une hypothétique compétition mondiale. Elles doivent au contraire s'inspirer du discours tenu par Drew Gilpin Faust, première présidente de l'université d'Harvard, le vendredi 12 octobre 2007, peut-être en présence, qui sait ?, de Philippe Aghion. Dénonçant les effets délétères des "exigences d'évaluation des enseignements et de l'obligation de former la main-d'oeuvre destinée à une économie mondialisée", elle a défendu les enseignements et les connaissances "parce qu'ils définissent ce qui, à travers les siècles, a fait de nous des humains et pas parce qu'ils peuvent améliorer notre compétitivité mondiale".

Une furieuse envie s'empare alors du lecteur du Monde et du rapport d'étape qui se prend à rêver de pouvoir dire crânement à la ministre de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, au professeur d'économie à l'université de Harvard, Philippe Aghion, et à Philippe Jacqué, "it's the university, stupid". »

jeudi 28 janvier 2010

La France est-elle une démocratie ? (36)

Non, si l'on considère que la censure de programmes scolaires est incompatible avec la démocratie !

mardi 26 janvier 2010

La France est-elle une démocratie ? (35)


NON ! suivant l'analyse du rapporteur public devant le Conseil d'État, et sans doute bientôt selon le Conseil d'État lui-même. Voyez la fin de l'article paru dans Le Monde daté du 27 janvier et écrit par Patrick Roger :


« [...] Le 15 décembre 2008, la ministre de la culture, Christine Albanel, écrit alors au PDG de France Télévisions, Patrick de Carolis, pour lui demander de décider lui-même la suppression des espaces publicitaires sur les chaînes de son groupe, " conformément à l'esprit et à la lettre de la réforme législative en cours ". France Télévisions s'exécute. Les nouvelles grilles de programme deviennent effectives alors que la discussion au Sénat n'a pas encore débuté. La loi sera promulguée le 5 mars 2009.

C'est cette décision qu'ont attaquée devant le Conseil d'Etat les sénateurs communistes, dénonçant un " excès de pouvoir ". En considérant que le projet de loi valait loi avant le vote du Sénat, la ministre, estiment-ils, a outrepassé ses compétences et procédé à " une ingérence inadmissible dans l'exercice du pouvoir législatif ", " incompatible avec le principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs ". L'analyse du rapporteur public leur donne droit. S'il est suivi, ce sera un lourd revers pour M. Sarkozy. »

Patrick Roger © Le Monde

lundi 25 janvier 2010

Faut-il imiter les Etats-Unis ? (Suite - n° 8)


Non ! si l'on en croit l'économiste Jacques Martin. Dans un article intitulé “ Obama peut-il encore réussir ? ” à paraître dans Le Monde daté du 26 janvier, le professeur Jacques Martin, parlant du projet de réforme de la santé, affirme : « Ce que révèle en tout cas l'échec désormais probable de cette réforme, c'est le mauvais fonctionnement de la démocratie américaine : le caractère non démocratique du Sénat, le poids exorbitant des lobbies, la nécessité d'acheter le vote des élus un par un et, plus que tout aujourd'hui, la violence des relations partisanes. »
Il est évident sans doute que la démocratie américaine a tout à apprendre de l'actuelle démocratie (si on peut dire) française !!!

samedi 23 janvier 2010

La France est-elle une démocratie ? (34)


En tout cas « une drôle de démocratie », selon Laurent Joffrin !

EDITO // Liberation.fr // Politiques 21/01/2010 à 00h00

Pinacle

Par LAURENT JOFFRIN

La qualité de l’homme - compétent, ferme, organisé, diplomate, etc - n’est pas en cause. Aussi bien l’importance du secrétaire général de l’Elysée dans le dispositif du pouvoir n’est pas nouvelle : il suffit de citer le nom de quelques prédécesseurs, Michel Jobert, Pierre Bérégovoy, Hubert Védrine ou Dominique de Villepin, pour s’en assurer. Enfin, la Constitution-caméléon qui organise la démocratie française autorise toutes sortes de configurations. Elle est comme un costume universel, qui va aussi bien aux gros ou aux maigres, au héros De Gaulle comme au sphinx Mitterrand ou au manager Sarkozy.

Non, le problème posé par la propulsion de Claude Guéant sur le devant de la scène est politique. En régime électif - doit-on le rappeler ? - la légitimité revient aux élus. Eux seuls ont qualité institutionnelle pour assumer et incarner le pouvoir. Et les ministres, mêmes non-élus, sont comptables de leurs actes devant le Parlement. Les conseillers, irresponsables par nature, ne sauraient se substituer à eux. Claude Guéant soudain visible se contente de réfléchir la lumière présidentielle : la Constitution est respectée mais son esprit trahi. Au fond, l’élévation au pinacle de ce simple chef d’état-major n’est qu’une modalité de la principale réforme sarkozienne, celle qu’on n’avoue jamais : une concentration de pouvoir inédite dans la République, qui couvre l’exécutif, le législatif et déborde sur la justice et les médias. Drôle de démocratie.

vendredi 22 janvier 2010

la France est-elle une démocratie ? (33)





DROITS ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX 20 janvier EDUCATION
Auteur de l'article : LDH
Suppression d’enseignements au lycée : la formation des citoyens en danger
Communiqué LDH
A la veille d’une nouvelle journée de grève des personnels de l’Éducation nationale pour attirer l’attention sur la détérioration de ce service public du fait des nombreuses suppressions de postes et de la diminution générale de ses moyens, la Ligue des droits de l’Homme met en garde, pour sa part, contre des mesures annoncées qui vont à l’encontre du rôle plus que jamais nécessaire de ce service public dans la formation des citoyens.
Elle s’inquiète de ce que la réforme des lycées :

• diminue l’enseignement des sciences économiques et sociales en classe de Seconde, au détriment d’une compréhension critique par les élèves des phénomènes dont la crise économique actuelle démontre pourtant l’importance ;

• supprime l’enseignement obligatoire de l’histoire pour les élèves de classe Terminale scientifique, alors que cette discipline joue un rôle essentiel dans la formation de l’esprit civique ; cela au moment même où les plus hautes autorités de l’Etat ne cessent de lancer des initiatives qui exigent une vraie culture historique pour être en capacité d’y réagir de manière critique.

La Ligue des droits de l’Homme s’alarme, par ailleurs, de décisions et interventions diverses dont le point commun semble être de chercher à porter atteinte à la liberté critique des enseignants, qui est pourtant un élément essentiel de la laïcité, en tentant de développer leur obéissance à l’exécutif :

• la création aux concours de recrutement des enseignants, Capes et agrégation, d’une épreuve orale sur la « compétence à agir en fonctionnaire de l’État » et de façon « responsable », qui peut cacher une tentative de sélectionner les candidats en fonction de leur soumission au pouvoir politique et de leur absence d’esprit critique ;

• la sanction par le ministère de l’Éducation nationale contre un professeur à l’École polytechnique, consistant à l’écarter d’un groupe d’experts où il travaillait depuis plusieurs années, pour avoir signé un appel contre la suppression de l’histoire obligatoire en Terminale scientifique ;

• les poursuites contre un professeur de sciences politiques à l’Université Paris Ouest Nanterre-La Défense, spécialiste des sondages, assigné en diffamation par Patrick Buisson, conseiller politique de Nicolas Sarkozy, alors que cet enseignant, dans le cadre de sa discipline universitaire, n’avait fait que mettre en évidence les sommes dépensées par l’Elysée pour payer des sondages d’opinion à la société Publifact dirigée par Patrick Buisson.

Pour la Ligue des droits de l’Homme, c’est la défense du rôle du service public dans l’éducation à la pensée critique et à la citoyenneté qui est en cause.

Paris, le 20 janvier 2010

http://www.ldh-france.org/Suppression-d-enseignements-au

mardi 19 janvier 2010

Même le syndicat de droite accuse !

Communiqué du 18 janvier 2010
L’HORIZON UNIVERSITAIRE S’ASSOMBRIT

AutonomeSup a pris connaissance des nouveaux textes régissant les concours de recrutement des professeurs des enseignements primaires et secondaires.
Si l’équilibre des coefficients des épreuves est plus rassurant qu’on pouvait le craindre, l’architecture de ces concours et la nature de certaines épreuves appellent de sérieuses réserves. La volonté d’uniformisation (et d’économie), a limité à deux, dans toutes les disciplines, les épreuves d’admissibilité (écrit) comme d’admission (oral), contrairement aux engagements pris par le précédent Ministre de l’Education Nationale. Résultat : alors que le but proclamé de la réforme est d’augmenter la qualification disciplinaire et professionnelle des futurs professeurs en passant d’un bac + 3 à un bac + 5, le contrôle des connaissances disciplinaires des candidats est affaibli !
- Certaines disciplines disparaissent, par exemple les langues dans le CAPES de lettres modernes ou dans le concours des professeurs des écoles (à l’heure où l’on fait l’Europe et où l’on commence l’enseignement des
langues dès le primaire, on supprime l’épreuve de langue au concours des futurs maîtres du primaire !).
- Ou bien, pour conserver un contrôle sur plusieurs disciplines en réduisant le nombre des épreuves, on arrive à des absurdités ou à des épreuves soit monstrueuses soit réduites à des prétentions très limitées : ainsi, pour le concours des professeurs des écoles, une seule épreuve écrite devra associer le français, l’histoire, la géographie et l’instruction civique. Au CAPES de lettres classiques (français, latin et grec), une seule épreuve de 5 heures regroupe la traduction d’un passage d’une des deux langues anciennes tiré d’un dossier de plusieurs pages avec une question de littérature ou de civilisation et une version de l’autre langue ! Jusqu’ici, ce CAPES comprenait à l’écrit, une version de quatre heures dans chacune des deux langues anciennes : on pouvait donner un texte cohérent suffisamment étendu pour juger la compétence des candidats.
C’est donc le sérieux des épreuves qui est mis en cause par la nouvelle organisation : le souhait affiché d’améliorer la formation des professeurs se traduit par la mise en place de concours au rabais ! Et que dire de la seconde épreuve d’oral : on y associe une épreuve sur dossier et une interrogation sur « Agir en fonctionnaire de l’Etat et de façon éthique et responsable ». Ici encore, le temps de préparation de ces deux épreuves en une (2 h.) semble insuffisant et, si dans cette association bizarre de deux domaines totalement différents, on apprécie la référence à la qualité de « fonctionnaire de l’Etat », on est perplexe sur les possibilités de quantifier les compétences « éthiques et responsables » et très inquiet des risques de voir une telle épreuve servir de filtre idéologique pour imposer un « politiquement correct ».
Sur la mastérisation, nous avons déjà dénoncé une circulaire qui prétend imposer aux universités la quadrature du cercle.
Concrètement, les universités ont le choix entre refuser d’adapter leurs masters à une circulaire inapplicable ou proposer des masters associant une initiation à la recherche à une préparation à des concours de contenu disciplinaire fortement réduit en dehors du cadre préconisé par la circulaire ministérielle (bref, violer la réforme pour pouvoir la mettre en œuvre !).
Si l’on ajoute que, comme nous le craignions, l’application de la loi LRU conduit dans certaines universités à de nombreux abus de pouvoir du président et de son équipe (la situation est parfois si grave qu’elle fera bientôt l’objet d’une communication spécifique), on voit que l’horizon universitaire s’assombrit.
Michel GAY

Jean-Louis CHARLET
secrétaire général
président
AutonomeSup (F.N.S.A.E.S.R ) - C-S-E-N _ F-G-A-F 4, rue de Trévise 75
009 PARIS
Tél: 01.46.59.01.01 Fax: 01.46.59.01.23

Nous accusons !


« Nous accusons la ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche, Valérie Pécresse, de détruire les cursus universitaires, des pans entiers de la recherche et de la formation des enseignants.
Nous accusons le ministre de l'Éducation nationale, Luc Chatel, de détruire le concours de recrutement, le statut de fonctionnaire d'État et d'encourager le développement des établissements privés d'éducation.
Nous accusons le Premier ministre, François Fillon, de réduire les ambitions du gouvernement pour l'Éducation Nationale à la seule réalisation de gains de productivité, au nom de la Révision Générale des Politiques Publiques.
Nous accusons le président de la République, Nicolas Sarkozy, de fouler aux pieds les règles implicites du paritarisme, de mépriser les critiques argumentées de la réforme des enseignants qui émanent unanimement de toutes les organisations concernées, syndicats, associations, sociétés savantes, et de tendre ainsi à constitutionaliser la funeste formule dont il est l’auteur “J’écoute, mais je ne tiens pas compte” ».

L'ensemble de l'appel :

lundi 18 janvier 2010

« Peut-on espérer un jour avoir des hommes politiques à la hauteur des enjeux du problème universitaire ? »


Point de vue « Sortir de la crise universitaire »
LE MONDE | 18.01.10 | 13h07 • Mis à jour le 18.01.10 | 13h07

Quelques phrases significatives :

« Au lieu de tenter d'améliorer la situation pour les enfants des classes populaires là où ils font aujourd'hui massivement leurs études, on entend faciliter leur accès homéopathique à ce qui est présenté comme les seuls vrais lieux de l'excellence : les classes préparatoires et les "grandes écoles". L'université n'est même plus pensée comme un lieu d'accueil pour les meilleurs étudiants issus des classes populaires.
[…]
La politique qui consiste à privilégier l'enseignement supérieur non universitaire sur l'université relève donc de la stratégie de Gribouille qui se plongeait dans la rivière pour éviter la pluie ! Il serait plus simple de reprendre les choses à l'envers en prenant la mesure du capital intellectuel actuellement réuni dans les universités françaises et de sa sous-utilisation gravissime par la nation. C'est pourquoi nous continuons à appeler à une Refondation de l'université française, qui mette un coup d'arrêt au processus en cours qui est une véritable bombe à retardement.
[…]
On laisse ainsi le public économiquement, socialement et culturellement le plus démuni entrer à l'université pour ensuite critiquer les taux d'échec dans les premiers cycles universitaires, qu'on attribue à la déficience pédagogique de l'enseignement universitaire. Ainsi, on enfonce les universités dans la crise tout en maltraitant le public étudiant issu des classes populaires. Comme remède, on envisage des quotas de boursiers dans les classes préparatoires et les "grandes écoles". Dans le meilleur des cas, ce sera une goutte d'eau dans la mer. Mais, à défaut de conséquences pratiques, la mesure a été médiatiquement efficace. On assiste donc là une fois de plus à une expression de la politique contemporaine, tournée vers l'impact médiatique de court terme et non vers la résolution en profondeur des problèmes. […] »

Olivier Beaud, professeur de droit public à Paris-II ;
Alain Caillé, professeur de sociologie à Paris-Ouest-Nanterre-la Défense ;
Guy Carcassonne, professeur de droit public à Paris-Ouest-Nanterre-la Défense ;
Bruno Courcelle, professeur d'informatique à Bordeaux-I, membre de l'Institut universitaire de France ;
Jean-Pierre Demailly, mathématicien, professeur à l'université Grenoble-I ;
François Dubet, sociologue, université de Bordeaux-II et directeur d'études à l'EHESS ;
Pierre Encrenaz, professeur de physique à l'UPMC et à l'Observatoire de Paris ;
Marcel Gauchet, philosophe et directeur d'études à l'EHESS et
François Vatin, professeur de sociologie à Paris-Ouest-Nanterre-la Défense.

Tous les signataires sont membres du groupe des Refondateurs de l'université (créé autour du Manifeste publié par "Le Monde" du 16 mai 2009).

Rien n'est encore perdu ?


L'APPEL

"L'Université brûle-t-elle ?" Débat européen sur la question des Universités (11/02/10 Sorbonne)

« […] bien qu'étant essentiellement basée sur des principes économiques et politiques, l'Europe se doit également de s'unir par d'autres moyens. Alors que le traité de Lisbonne fixe à l'Europe l'objectif d'être l'économie de la culture la plus évoluée du monde, il est grand temps que la jeunesse et le monde universitaire européen s'empare de la question et définisse sa vision d'une véritable Europe de la Culture, une Europe d'échange, de débats d'idées, de réflexion, afin de forger concrètement le monde de demain. […] »

« […] anche se l’Europa è essencialmente basata su dei principi politici e economici, deve anche unirsi con altri mezzi. Il tempo è venuto per la gioventù e il mondo universitario europeo di creare un’Europa delle Cultura, un’Europa di scambi, di dibattiti d’idee, di riflessione, che tenterà di costruire il mondo di domani. […] »

« […] aún que siendo esencialmente basada sobre principios económicos y políticos, Europa tiene que unirse también por otros medios. Cuando el Tratado de Lisbona fija a Europa el objectivo de ser la economía cultural la más evolucionada del mundo, ya es ahora que la juventud y el mundo universitario europeo se apoderen del tema y definan su visión de una verdadera Europa de la Cultura, una Europa de intercambios, de debates de ideas, de reflexión, para forjar concretamente el mundo de mañana. […] »

« […] Although Europe is essentially based upon economic and political principles, it needs to create its unity through other means too. While the Treaty of Lisbon’s aim is to make Europe the world’s top player in the economy of culture, it is high time for Europe’s youth and for its academic world to redefine the issue and put forth its own vision of a genuine ‘Europe of culture’: one of intellectual exchange, debates and in-depth analysis, in order to start building the world of tomorrow. […] »

« […] die aktuellen Uni-Proteste in Europa und die Zukunft des Bildungs- Forschungs- und Schulwesens. […] »


samedi 16 janvier 2010

La France est-elle une démocratie ? (31)


Une démocratie en grand danger, si l'on en croit Dominique Rousseau, Professeur à l'université Montpellier-I, membre de l'Institut universitaire de France, dans son article paru dans Le Monde du 16 janvier sous le titre « Il est dangereux de réformer au mépris de la Constitution — La Loi fondamentale est une garantie pour les citoyens » et dont voici quelques extraits significatifs :

« […] [La Constitution] oblige, par ses règles de procédure, à une délibération argumentée, patiente et éclairée sur le bien-fondé de la future loi, sa qualité rédactionnelle et son impact social, économique, financier et politique. Elle oblige aussi, par ses principes de fond, à une réflexion sur le sens, la portée et la valeur que peut représenter pour le " bien commun " l'adoption de telle ou telle loi. La volonté générale ne se produit pas spontanément ni dans l'insouciance de l'instant ; elle se construit avec prudence, avec mesure, et la Constitution est cette Loi fondamentale qui permet au temps court, léger et parfois étourdi d'une initiative législative de se confronter au temps long des principes qu'elle énonce.

Or le président de la République gouverne comme il vit : dans l'instant, sans représentation d'une histoire particulière à assumer et à transmettre, celle qui s'exprime dans les déclarations des droits de 1789 et de 1946, sans souci du passé et sans davantage souci de l'avenir. A l'instant où il parle, il veut, il pense qu'à l'instant sa parole fait droit.

[…]

Cette méthode de gouvernement est dangereuse pour la démocratie, qui s'est toujours construite et exercée dans le cadre d'institutions reconnues et respectées. M. Sarkozy, qui se plaît à citer les hommes de gauche, devrait relire le discours de la méthode adressé par M. Rocard à ses ministres : " Il convient de tout faire pour déceler et éliminer les risques d'inconstitutionnalité susceptibles d'entacher les projets de loi, les amendements et les propositions de loi inscrits à l'ordre du jour ; cette préoccupation doit être la nôtre même dans les hypothèses où une saisine du Conseil constitutionnel est peu vraisemblable. " Comme le disait Benjamin Constant, cette contrainte " est une garantie pour le peuple ". »

Question subsidiaire que se pose Étourneau :
Quand on dit : « La volonté générale ne se produit pas spontanément ni dans l'insouciance de l'instant ; elle se construit avec prudence, avec mesure », n'est-ce pas relativiser (avec raison) le poids des diverses élections dans l'expression et la construction de la « volonté générale » et du « bien commun » ? N'est-ce pas relativiser (avec justice) l'efficacité de la démocratie représentative par rapport à la démocratie participative (même réduite aux grands corps de l'Etat !) ? N'est-ce pas relativiser le pouvoir (absolu ?) de l'exécutif par cette volonté générale plus transcendantale qui s'exprime à travers les traditions du passé et les utopies de l'avenir ?


Capitulation de l'université française ?

On trouve posté ce 16 Janvier 2010 sur le blog Médiapart de Christophe Pebarthe cet « Appel d'un président d'université au sujet de la réforme de la formation des enseignants ».



[Chers collègues,]

C'est le coeur serré que je vous dis aujourd'hui qu'il faut tenter de cesser le combat. Vous étiez prêts à continuer la lutte, je le savais. Notre défaite est venue de nos relâchements. L'esprit de jouissance détruit ce que l'esprit de sacrifice a édifié. On a revendiqué plus qu'on a servi. On a voulu épargner l'effort ; on rencontre aujourd'hui le malheur. C'est à un redressement intellectuel et moral que, d'abord, je vous convie.

C'est vers l'avenir que, désormais, nous devons tourner nos efforts. Un ordre nouveau commence. Vous avez souffert. Vous souffrirez encore. Beaucoup d'entre vous ne retrouveront pas leur métier. Votre vie sera dure. Ce n'est pas moi qui vous bernerai par des paroles trompeuses. Je hais les mensonges qui vous ont fait tant de mal. Pour le présent, [les universitaires] sont certains de montrer plus de grandeur avouant leur défaite qu'en lui opposant des propos vains et les projets illusoires.

Je suis et resterai avec vous dans les jours sombres. Soyez à mes côtés. Le combat reste le même. Pour accomplir la tâche immense qui nous incombe, j'ai besoin de votre confiance. L'assemblée nationale [le 10 août 2007] m'a investi de pouvoirs étendus. [Désormais, avec le passage aux responsabilités et compétences élargies], les fonctionnaires ne seront plus entravés dans leur action par des règlements trop étroits et par des contrôles trop nombreux. Ils seront plus libres ; ils agiront plus vite. Mais ils seront responsables de leurs fautes. La responsabilité des fonctionnaires ne sera plus un vain mot.

Il n'y a plus de place pour les mensonges et les chimères, lI faut que les [universitaires] s'attachent à supporter l'inévitable, fermement et patiemment. Le rôle du [président] est de les y aider, par une action constante, uniquement inspirée de la passion du bien public. Nous nous engageons simplement à travailler de notre mieux, honnêtement, courageusement, de toutes nos forces de notre esprit et. de notre coeur, pour remplir la haute et difficile mission qui nous est dévolue. Faisons notre devoir les uns et les autres, en toute conscience.

L'École française de demain enseignera avec le respect de la personne humaine, la famille, la société, la patrie. Elle ne prétendra plus à la neutralité. La vie n'est pas neutre ; elle consiste à prendre parti hardiment. Il n'y a pas de neutralité possible entre le vrai et le faux, entre le bien et le mal, entre la santé et la maladie, entre l'ordre et le désordre [...]. Nous maintiendrons, nous élargirons s'il se peut, une tradition de haute culture qui fait corps avec l'idée même de notre [université].

Nous favoriserons, entre nos [collègues] et nos industriels, une coopération féconde et, sans abaisser le niveau de notre enseignement supérieur, nous nous efforcerons d'orienter dans un sens plus réaliste, la formation de nos ingénieurs, de nos médecins, de nos magistrats, de nos professeurs eux-mêmes. Nous nous attacherons à détruire le funeste prestige d'une pseudo-culture purement livresque, conseillère de paresse et génératrice d'inutilités.

C'est dans cet esprit que [le gouvernement réorganise] l'école [...]. Elle continuera comme par le passé, cela va sans dire, à enseigner le français, les éléments des mathématiques, de l'histoire, de la géographie, mais selon des programmes simplifiés, dépouillés du caractère encyclopédique et théorique qui les détournait de leur objet véritable. Par contre, une place beaucoup plus large y sera faite aux travaux manuels dont la valeur éducative est trop souvent méconnue. Il faudra que les maîtres de notre enseignement primaire se pénètrent de cette idée, et sachent en pénétrer leurs élèves, qu'il n'est pas moins noble et pas moins profitable, même pour l'esprit, de manier l'outil que de tenir la plume, et de connaître à fond un métier, que d'avoir sur toutes choses des clartés superficielles.

Mes chers [collègues], on vous a parlé souvent, depuis quelques années, [du collège] unique. [Le collège] unique, c'était un mensonge parmi beaucoup d'autres ; c'était, sous couleur d'unité, une école de division, de lutte sociale [...]. Nous, qui avons horreur du mensonge, qui voulons en toute circonstance vous dire la vérité, [nous vous disons que le gouvernement entreprend] de faire pour la France, l[e] véritable [collège] unique ; [celui] qui, quels qu'en soient les maîtres, quels qu'en soient les programmes, sera animée d'un esprit unique ; [celui] qui mettra tous les Français à leur place [...] ; [celui] qui, leur accordant toutes les libertés compatibles avec l'autorité nécessaire, leur concédant toutes les égalités compatibles avec une hiérarchie indispensable, les mêlant tous dans un grand élan chaleureux de fraternité nationale, fera de tous les Français les servants d'une même foi, les chevaliers d'un même idéal, symbolisé dans ce mot unique : France.

Il faut reconstruire [l'université]. Cette reconstruction, c'est avec vous que je veux la faire. Bientôt, je vous demanderai de vous grouper pour, qu'ensemble, [...] vous meniez cette révolution jusqu'à son terme, en ralliant les hésitants, en brisant les forces hostiles et les intérêts coalisés, en faisant régner, dans [l'université] nouvelle la véritable fraternité [...].

[Cordialement,

Philippe P., président de l'université (illisible)]

jeudi 14 janvier 2010

L'ignorant patenté, l'aimable crétin ? Mais de qui peut-il bien s'agir ?

« C'est utile, vous savez, d'être un ignorant patenté, un aimable crétin en politique. Ainsi n'éprouve-t-on pas ces pudeurs, ces scrupules, ces réserves qui empêchent trop souvent l'homme intelligent, surtout s'il est doué du sens du ridicule, de s'abandonner à la démagogie la plus outrancière, de changer de cap sur l'heure sans souci de passer pour une girouette, de recourir aux arguments et aux trucs de métier les plus éculés et misérables sans l'ombre d'une hésitation. la pensée de faire de la sottise, de l'inculture et de l'absence de caractère la pierre de touche de la réussite en politique. Mais tout de même la compétence, la conviction et l'honnêteté intellectuelle, c'est beaucoup, c'est trop. »

De qui s'agit-il dans cette citation de Pierre Viansson-Ponté faite par Franck Nouchi dans sa chronique parue dans Le Monde du 12 janvier ? Qui peut donc être le modèle de cet « ignorant patenté » ?

mercredi 13 janvier 2010

Nous sommes tous des Auvergnats ! (2)


Billet de Hervé Le Tellier sur le Check-list du Monde du 13 janvier :

Un étranger pourra-t-il voter aux élections locales ? Hortefeux est contre, sauf en cas de réciprocité. Exemple : un Auvergnat ne votera à Paris que si les Français peuvent voter en Auvergne.

jeudi 7 janvier 2010

Et dire que cela ne fait que commencer !

L'université de Strasbourg en proie à des dysfonctionnements

« L'Université de Strasbourg (UdS), issue de la fusion il y a un an des universités Louis-Pasteur, Marc-Bloch et Robert-Schumann est en proie à des dysfonctionnements, selon le journal 20 minutes. Les syndicats étudiants et enseignants dénoncent la surcharge de travail qui accable le personnel administratif, le défaut de paiement des salaires pour les vacataires et les contractuels, ainsi que des examens non-uniformisés.
Le président de l'UdS, Alain Beretz, a répondu à ces critiques en précisant ne pouvoir procéder à des redistributions de postes faute de moyens financiers et espérer "fortement" bénéficier d'une partie du grand emprunt. M. Beretz a en revanche nié les salaires impayés mais avoué des retards de paiements pour les vacataires. Quant aux examens non uniformisés, "c'est un problème qui existait avant la fusion", a rétorqué le président de l'UdS. »

Mis en ligne le 07-01-2010 par

Nous sommes tous des Auvergnats !

Sur Télérama.fr de ce jour :
L'OEIL DE TRAPIER





mercredi 6 janvier 2010

La France est-elle une démocratie ? (30)


À peine, et en pleine régression, si l'on en croit Dominique Barella, ancien président de la formation parquet du Conseil supérieur de la magistrature, ancien président de l'Union syndicale des magistrats, qui s'exprime dans un article paru dans l'édition du Monde datée du 07.01.10 !

Extraits :

« Depuis 2003, les indices du refroidissement démocratique sont palpables dans le domaine de la justice, l'année 2009 restera comme celle de l'accélération du processus. La cause en est connue : un président de la République qui pollue l'équilibre des pouvoirs en intervenant à tout bout de champ dans la sphère judiciaire. Un pouvoir exécutif qui accélère comme jamais la concentration dans ses mains de tous les pouvoirs de l'Etat par l'intermédiaire de ses affidés.

[...]

En cette période de glaciation judiciaire, le magistrat indépendant, se comportant en recours pour le citoyen, est une espèce en voie de disparition. Le pouvoir a su manier la soupe de la promotion et le collier de la dépendance, qui mettent sous pression ceux des magistrats qui tentent encore de faire simplement leur travail. Les primes au rendement, appelées en novlangue de management "primes au mérite" servent aux chefs de cours pour pousser au productivisme judiciaire. En quinze minutes, le jugement est finalisé, le prévenu est transformé en condamné, produit fini de tribunal.

Si, au moins, la justice faisait son travail face à l'explosion du nombre des gardes à vue (570 000 par an) voulue par le chef de l'Etat. Presque seuls, les syndicats de police ont eu le bon réflexe républicain en manifestant contre la culture du chiffre en matière pénale. Les parquets, censés vérifier le fondement des gardes à vue, ne les contrôlent que formellement faute de moyens. Leur multiplication aboutit à ce que des hommes et des femmes soient dénudés, enfermés derrières des grilles dans des locaux indignes.

Tout citoyen actif ou retraité, pauvre ou riche, jeune ou vieux peut être ainsi humilié dans une froide cellule sans savoir pourquoi. La haute hiérarchie judiciaire ne s'en émeut pas. A-t-on entendu une forte parole des chefs de la Cour de cassation sur ce sujet ? Non. Qu'est donc devenu le rôle de magistrat gardien des libertés publiques tel que le prévoit la Constitution ? Passé par pertes et profits du culte rendu au pouvoir. Pouvoir que les hauts dignitaires de la justice ont applaudi quand, lors de la rentrée solennelle de la Cour de cassation en 2009, le chef de l'Etat leur a annoncé la suppression du juge d'instruction indépendant.

[...]

Ainsi s'achève l'année judiciaire 2009 qui a glacé les défenseurs de l'équilibre des pouvoirs. L'année judiciaire 2010 commence encore par un effet d'annonce du président de la République qui prétend améliorer l'accès des victimes à la justice alors qu'il les a sacrifiées sur l'autel de la nouvelle carte judiciaire et va les priver de juges d'instruction. Seule une prise de conscience collective permettra de sortir de cette régression démocratique. »



Demain, ce sera aussi le lot des universités françaises « autonomes » …

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C'est, en millions d'euros,
la somme que pourrait lever en Bourse l'université de Cambridge pour financer des projets d'infrastructures, Selon le Financial Times. Les universités britanniques doivent faire face aux coupes budgétaires publiques.


Source :
lemonde.fr
La Toile de l'éducation : Les grandes écoles se rebiffent
Date : 6 janvier 2010 15:17:54 HNEC


La France est-elle une démocratie ? (29)

mardi 5 janvier 2010

Y a-t-il encore de vrais journalistes en France ?

Sur Médiapart, ce 5 janvier :
Quand les journalistes du Monde comprendront la réforme de l'Université, les universitaires liront-ils encore le journal ?
04 Janvier 2010 Par Christophe Pebarthe

Après le fort mouvement des universités l'année dernière, même les plus pessimistes pensaient que les journalistes du Monde, Philippe Jacqué et d'autres, finiraient par comprendre. Qu'ils rédigeraient eux-mêmes leurs articles sans reprendre béatement les slogans gouvernementaux… Au moins pouvait-on souhaiter qu'en cette période de trêve, la rhétorique méprisante et modernisatrice perdrait de sa verve, qu'à minuit un toast serait porté à la santé de la déontologie, bref que de bonnes résolutions seraient prises en cette Saint-Sylvestre 2009. Plus de papiers rédigés à la sauvette, depuis le surplomb confortable que constitue un journal du soir et de référence, mais des articles faisant l'effort d'expliquer, de rendre compte des faits, quitte à maintenir dans un éditorial des commentaires peu amènes sur "le degré de crispation des universités" au moment de "la crise universitaire du printemps 2009" (Le Monde, 5 janvier 2010). Rassurons les journalistes du Monde, à force d'être crispés, les universitaires ont appris à vivre avec les crampes que certaines lectures leur procurent…


Remercions Maryline Baumard et Philippe Jacqué. Ils n'ont pas mis longtemps à nous détromper. Dès le 1er janvier (édition du 2 janvier), pas de temps à perdre, une nouvelle fois, ils célèbrent l'autonomie des universités, une véritable "révolution culturelle". Les plus anciens se souviendront que l'éloge avait déjà été fait l'année dernière, au moment des premiers passages aux responsabilités et compétences élargies. Les mauvaises langues supposent que la prochaine apologie pour janvier 2011 est peut-être déjà écrite… À moins que, pour plaire au président de la République, on ne décide de resservir le même article, afin de signifier à tous les esprits retors qui auraient le mauvais goût de moquer des discours identiques prononcés à un an d'écart, que si l'histoire ne repasse pas les plats, Le Monde n'hésite pas à servir la même soupe.


Comme le notent Maryline Baumard et Philippe Jacqué, l'épidémie des responsabilités et compétences élargies (RCE) gagne peu à peu le paysage universitaire. Trente-trois nouvelles universités accèdent à ce statut en cette année 2010. À y bien réfléchir, mais sans doute est-ce par précaution déontologique, nos deux journalistes auraient dû ajouter, "seulement trente-trois". Comment comprendre en effet que trente-deux établissements, vraisemblablement crispés, attendent au lieu de choisir cette libération ? Le lecteur attentif sent poindre quelque explication dans le constat incidemment énoncé. "Très peu d'universités de sciences humaines sont pour l'instant passées aux RCE". Pour quelles raisons ces universités-là demeurent-elles en dehors de la "révolution culturelle" ? N'est-ce pas leur dernier soubresaut, leur baroud d'honneur avant une capitulation en rase campagne devant la modernité triomphante de l'autonomie ? Mais sans doute s'agit-il simplement de souligner que certaines universités, toujours les mêmes, sont à la remorque des autres, toujours les mêmes, par pusillanimité ou par impréparation ("soit parce qu'elles ne l'ont pas encore demandé, soit parce qu'elles ne l'ont pas obtenue").


Cette hypothèse est toutefois malmenée dans la chute choisie par les journalistes. "Il leur reste jusqu'au 1er janvier 2012 pour s'y préparer. Deux ans pour que, selon l'expression de Valérie Pécresse, ‘l'expérience donne envie aux autres’". Malmenée (pourquoi donc n'en auraient-elles pas envie ?), mais sans que le lecteur puisse en savoir plus. Pourtant, les mérites des responsabilités et compétences élargies ne peuvent que faire envie si on s'en tient à la présentation de Maryline Baumard et Philippe Jacqué : un budget triplé, un recrutement plus souple, une plus grande liberté pour les rémunérations, plus généralement une amélioration du quotidien des personnels, apparition de manne grâce à une gestion plus serrée, qui dit mieux ? Si le lecteur informé y ajoute les milliards du grand emprunt, il ne peut que fustiger le mouvement de l'année dernière et, incidemment, les universités de sciences humaines et sociales qui rechignent. Le plus modéré, on l'imagine fin lettré car, après tout, il lit Le Monde, s'en tiendra à une spirituelle allusion persane et s'étonnera : comment peut-on être contre ? N'en déplaisent à Maryline Baumard et Philippe Jacqué, les responsabilités et les compétences élargies ne font pourtant pas envie à tous les universitaires. Et nul besoin de chercher des arguments spécieux. La simple lecture de l'article suffit.


– Un budget triplé ? C'est un jeu d'écriture puisque il s'agit de l'intégration de la masse salariale au budget de l'université. En revanche, s'il est sûr que "nos établissements ont appris à gérer" aux dires de Lionel Collet, président de Lyon 2 et de la Conférence des Présidents d'Université, rien n'est dit sur le surcoût de cette autonomie, ne serait-ce qu'en terme de personnels (renforcement des services financiers, de la direction des ressources humaines…). Surcoûts, alors même que cette "révolution culturelle" se fait à moyen humain constant puisqu'il n'y a pas de création de postes.
– Un recrutement plus souple ? Foutaise, car les postes au fil de l'eau sont une réalité pour toutes les universités, tout comme les comités de sélection dont le bilan pour leur première année de fonctionnement fait apparaître nombre de dysfonctionnements que ne connaissaient pas les rigides commissions de spécialistes.
– Une plus grande liberté pour les rémunérations ? Mais sous quelle forme ? Des primes pour "sortir du carcan de la traditionnelle grille des salaires" ? Par principe ministériel, les primes d'excellence scientifique ne peuvent s'appliquer à tous les enseignants-chercheurs. Autrement dit, le quotidien de la majorité d'entre eux demeurera "la traditionnelle grille" et le niveau scandaleusement bas des indices, enseignants comme BIATOSS (personnels administratifs) du reste. Par CDD ou par CDI afin "d'aller chercher des enseignants très pointus à l'étranger" ? Mais alors, la liberté tant vantée consiste simplement à détruire le statut de fonctionnaire et à organiser les conditions d'une privatisation des universités, en commençant par le personnel. Est-ce donc la précarité qui améliorera leur quotidien ?
– L'apparition d'une manne par une gestion plus serrée ? Gaspillait-on l'argent auparavant dans les universités ? Disposait-on de ressources à ce point mirifiques qu'on les dépensait naguère sans compter ? Au-delà de ce déplaisant sous-entendu, il eut été plus honnête de rappeler que ce nouveau statut implique aussi des dépenses nouvelles qui sont loin d'être anecdotiques : certification des comptes, paie à façon… Si on ajoute la modification des règles établissant le montant de la dotation des universités (normes SYMPA ou, pour citer Le Monde, le fait qu'"un cinquième du budget des universités sera corrélé à leurs performances"), c'est plutôt à une mise en faillite programmée à laquelle nous assistons. Que ceux qui doutent tournent leurs yeux vers les hôpitaux publics et qu'ils y comparent la tarification à l'acte, l'autonomie de gestion avec la réforme que subit aujourd'hui l'Université. Ils y verront l'avenir du service public de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Passe encore que dans un éditorial récent, Le Monde (5 janvier 2010) ne trouve rien de mieux qu'une vulgaire argumentation sur la mondialisation qui "fait de la connaissance un enjeu crucial" et qui "oblige à rechercher une taille critique" (Combien d'étudiants à Harvard ?) et une énième "seule voie pour construire une économie de la connaissance" pour suggérer qu'il n'y a pas d'alternative. Il y a longtemps que le syndrome TINA (There is no alternative) fait des ravages dans les éditoriaux. Mais pourquoi ajouter à ces truismes une présentation biaisée, pour ne pas dire plus, de l'autonomie ? Pourquoi, si Maryline Baumard et Philippe Jacqué souhaitent informer les lecteurs du Monde sur les réformes en cours, s'en tiennent-ils à interroger deux présidents, ou du moins se contentent-ils de citer ces deux seuls membres de l'Université ? Les BIATOSS, les enseignants-chercheurs ont-ils déjà disparu du paysage universitaire ? Ou bien s'agit-il d'éviter de faire apparaître, sur un autre mode que celui des crispations et autres malaises, que des arguments sérieux existent à l'encontre des responsabilités et des compétences élargies ? Autrement dit, que nombres d'étudiants, de BIATOSS et d'enseignants-chercheurs continuent de souhaiter une autre loi que la loi LRU pour présider aux destinées des universités ?


Soyons toutefois magnanimes et mettons sur le coup de l'effet retard d'une fête aux toasts un peu trop appuyés cet article partiel et partial. Et à défaut d'exiger de bonnes résolutions, faisons un rêve, lire dans Le Monde une analyse contrastée, faisant état des débats qui traversent l'Université, n'hésitant pas le cas échéant à mettre en évidence les limites de la propagande gouvernementale et de celle qui émane de la Conférence des Présidents d'Université, sans pour autant céder aux sirènes des esprits contestataires, bref y trouver un article écrit par des journalistes soucieux d'informer sans déformer qui se souviennent qu'avant la "révolution culturelle" il y eut cent fleurs… Encore un effort Maryline Baumard et Philippe Jacqué…
Christophe Pébarthe, maître de conférences en histoire grecque, Bordeaux 3.